Documentée dès 942 (Lièvre 1869, p. 248), l’église fut construite au XIIe siècle comme l’en indique le style des éléments sculptés, notamment des modillons. Au XVe siècle elle fut agrandie avec l’ajoute d’un collatéral sur le coté septentrionale, composé par quatre travées voûtées en ogive et chapelle orientale qui joue en fonction d’abside et de transept, ouvrant sur la nef à la hauteur de la travée sous le clocher ; l’accès est garanti par une petite porte en accolade ouverte en façade. Des travaux sont puis réalisées aux XVIIe siècle, tandis qu’au XIXe siècle l’édifice a été objet de restaurations à plusieurs reprise. En fin, dans les années 1950 il a été nécessaire de reconstruire la voûte de la nef qui s’était effondrée (voir la notice dans la base Gertrude).
Des représentations héraldiques décorent les clefs de voûte du collatéral et donnent des indications fondamentales pour établir la chronologie des travaux et en reconnaître le commanditaire. Notamment, c’est l’armoirie sculptée sur la clef de la chapelle terminale qui offre les informations les plus précieuses (armoirie 3). L’écu armorié repose sur deux bandes disposées en sautoir, tandis que la boule qui se trouve dans la partie supérieure représente le clou qui, dans les cérémonies héraldiques, permettait de suspendre les boucliers aux murs.
Romagne, église Saint-Laurent, bas coté nord, clef de voûte de la chapelle absidale, armoirie Gourgaud.
Dans l’enseigne, encore une fois probablement restaurée sans grand intérêt pour la reconstruction philologique de son aspect originel, il est possible de reconnaitre les armes des Gourgaud (ou Gourjault, Gouregeault) qui portaient de gueules au croissant d’argent (Gouget 1866, p. 48). Seigneurs de la Millière depuis 1406, quand Jean II Gourgaud épousa Jeanne de Fedeau (Beauchet-Filleau 1905, t. 3, p. 384), ils avaient probablement le patronage de l’église Saint-Laurent, comme l’on laisserait imaginer la présence de tombeaux, plus tardifs (XVIIe-XVIIIe siècles) de quelque descendant de la famille relevés à son intérieur (Brouillet 1865, p. 279-280 et pl. 12 ; Longuemar 1863, p. 357-358, 365, 367).
La forme de l’écu, encore vaguement triangulaire et pointu, serait convenable à une datation dans la première moitié du XVe siècle. Le constructeur de la chapelle pourrait donc être identifié avec le même Jean II, qui mourut en 1443 après avoir fait testament à Lusignan le 5 octobre 1442, en souhaitant pourtant d’être inhumé dans la chapelle de ses prédécesseurs, proche de l’église paroissiale de Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Pranzay. A remarquer, en fin, l’orientation de l’écu, avec le chef direct vers la façade de l’église.
De même, les deux écus sculptés sur les clefs de voûte des deux premières travées du collatéral (armoiries 1, 2) sont également disposé avec la pointe en direction de la chapelle terminale et le chef vers la façade. Les deux boucliers ne portent aucune trace de représentations héraldiques qui, d’ailleurs, auraient pu y être tout simplement peintes. Dans la clef de voûte de la première travée, l’écu est surmonté par un cercle (armoirie 1),
Romagne, église Saint-Laurent, détail des voûtes de la Ière et IIème travées.
qui pourrait encore représenter son système d’accrochage au mur. Dans la travée successive, toutefois, ces cercles deviennent trois et se disposent un au-dessus du chef et deux aux parties opposées de la pointe de l’écu (armoirie 2). Au défaut de comparaisons possibles, il est difficile à savoir s’il s’agissait d’un élément ornemental ou, plutôt encore, d’une représentation des clous d’accrochage.
Des traces d’une litre funéraire, probablement du XVIIe siècle, sont enfin visibles sur la paroi septentrionale de la chapelle terminale du collatéral.
Auteur : Matteo Ferrari
Pour citer cet article
Matteo Ferrari, Romagne, église Saint-Laurent, http://base-armma.edel.univ-poitiers.fr/monument/eglise-saint-laurent-romagne/, consulté le 22/05/2025.
Bibliographie études
P.-A. Brouillet, Indicateur archéologique de l’arrondissement de Civray. Canton de Couhé-Vérac, Civray 1865.
A. Gouget (par), Armorial du Poitou et état des nobles réservés dans toutes les élections de la généralité, Niort 1866.
A.F. Lièvre, Notes sur Couhé et ses environs, Paris 1869.
H. Beauchet-Filleau, Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou, t. 3, Poitiers 1905.