Sous le vocable de saint Vincent et saint Germain (Anger 1909, p. 72), de le IXème siècle et jusqu’à la Révolution l’église de Naintré dépendit de l’abbaye bénédictine Saint-Germain-des-Prés de Paris (Beauchet-Filleau 1868, p. 328 ; Anger 1909, p. 1-3), conservant des reliques du martyr de Saragosse. Reconstruite presqu’intégralement en 1880, parce que jugée trop petite et menaçant ruine dans plusieurs de ses parties (Parvis), elle ne conserve de l’époque médiévale que la travée sous clocher, dont la structure date du XIIème siècle, et la chapelle latérale est. Construite au XVème siècle, cette dernière se signale de l’extérieur par le mur pignon percé par une grande baie et par les rampants ornés d’une série continue de feuilles charnues culminant dans le fleuron terminal ; sur le côté sud, une porte donnait directement accès à l’intérieur de la chapelle, comme il était commun à l’époque.
Naintré, église Saint-Vincent, chapelle est (intérieur).
À l’intérieur de la chapelle, des écus armoriés sculptés sur la clef de voûte (armoirie 1) et, encastrés dans des branches d’arbre, sur les culots soutenant les nervures de la voûte (armoiries 2, 3) permettent d’attribuer la construction de cette partie de l’édifice aux Levrault (Barbier 1895, p. 437), seigneurs du lieu, qui portaient de gueules à la bande d’argent (voire d’argent, à la bande de gueules ou d’azur : Beauchet-Filleau 1972, p. 93). En 1462, « Johannem Delavau » (à interpréter probablement comme « des Levrault ») et sa femme Jeanne Chauvelle fondèrent dans l’église une chapellenie perpétuelle dont le recteur de l’église aurait eu le patronat (Beauchet-Filleau 1868, p. 328 ; Anger 1909, p. 72). L’armoirie des Lavrault est représentée dans les emplacements les plus éminents de la chapelle : sur la clef-de-voûte (armoirie 1) et sur le culot situé à la droite de l’autel (armoirie 2) ; celle que l’on soupçonne appartenir à Jeanne Chauvelle est en revanche sculptée sur le culot à la gauche de l’autel (l’armoirie, partiellement grattée était à l’origine chargée de trois pals) (armoirie 3). On notera que l’armorie sculptée sur la clef de la voûte est orientée avec le chef tourné en direction de la paroi nord, contre laquelle se trouvait l’autel.
Il est plausible que dans la seconde moitié du XVème siècle, les Lavrault financèrent d’autres travaux dans l’église. Leurs armes se trouvent en effet reproduites sur la clef de voûte de la travée sous clocher, insérées dans un encadrement polylobé orné de feuilles charnues sur les quatre côtés (armoirie 4). Il sera toutefois intéressant de noter que l’écu est orienté, d’une façon tout à fait insolite, avec le chef en direction de la nef au lieu que du chœur. Cela nous laisse croire que cet élément ait pu être récupéré d’une autre partie de l’édifice et remployé à cet emplacement au cours des travaux de restauration.
Écu aux armes des Lavrault. Naintré, église Saint-Vincent, chapelle latérale est.
D’ailleurs, une description précédente à la destruction de l’ancien édifice nous apprend que le chœur à chevet plat (« carré ») était couvert par une voûte d’ogive dont la clef portait « un écusson chargé d’une bande » (Répertoire 1859-1861, p. 312). De même, il faudra s’interroger sur la provenance d’une autre clef-de-voûte aux armes des Lavrault insérée dans la couverture de la chapelle latérale ouest (armoirie 5), visiblement édifiée lors des travaux de la fin du XIXème siècle (elle n’est pas visible sur un cliché photographique pris après 1880 par le photographe châtellerauldais Charles Arambourou). Elle ne semble pas avoir pris la place d’une deuxième chapelle érigée au XVème siècle dont nous avons notice. Relevant de la seigneurie de la Tour et appelée des Blondeaux du nom la famille qui l’avait érigée, elle se trouvait « à la porte actuelle de l’église de Naintré » (Répertoire 1859-1861, p. 311) : vendue comme bien national, elle a dû disparaître depuis.
Auteur : Matteo Ferrari
Pour citer cet article
Matteo Ferrari, Naintré, église Saint-Vincent, http://base-armma.edel.univ-poitiers.fr/monument/eglise-saint-vincent-naintre/, consulté le 22/05/2025.
Bibliographie études
« Répertoire archéologique du département de la Vienne », dans Bulletin de la Société des Antiquaires de l ‘Ouest, 9, 1859-1861 (1860), p. 219-343.
H. Beauchet-Filleau, Pouillé du diocèse de Poitiers, Niort-Poitiers 1868.
A. Barbier, « Un épisode de la Ligue en Châtelleraudais. Le combat d’Isle (6 février 1592) », dans Mémoires de la société des Antiquaires de l’Ouest, 2e s., 18, 1895, p. 401-471.
D. Anger, Les dépendances de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés, t. 3, Ligugé-Paris 1909, p. 1-77.
J. Beauchet-Filleau, Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou, t. 6, Fontenay-le-Comte 1972.
Photographies du monument
Armoiries répertoriées dans ce monument
Église Saint-Vincent, Naintré. Armoirie Jean ( ?) Levrault (armoirie 1)
D'(argent ?) à la bande de (gueules ou azur ?) alias de (gueules) à la bande d'(argent).