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ARmorial Monumental du Moyen-Âge

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Niort, Hôtel de Ville (le Pilori)

L’édifice qui porte actuellement le nom de Pilori – en souvenir de l’ancien pilori dont il prit la place – a été construit à l’initiative du corps municipal niortais pour servir d’hôtel de ville dans les années 1380-1390. C’est alors qu’il est mentionné pour la première fois dans les documents concernant les travaux commandités dans la ville par Jean de Berry (Courant 2014, p. 120). Il s’agit du premier hôtel de ville expressément construit par les magistrats niortais : dès l’époque de la concession de la première charte de commune (1199), ils se réunissaient en effet soit dans la maison de l’un d’entre eux, soit dans un édifice loué pour cette utilisation. La construction de l’édifice municipal se situe donc dans la première phase de la seigneurie de Jean de Berry, qui favorisa nombre d’œuvres publiques (halles, port) dans la ville particulièrement touchée par les guerres contre les Anglais, par le biais d’exemptions fiscales et par la levée d’impôts spéciaux.

Niort, ancien hôtel de ville (le Pilori), beffroi avec décor armoirié.

Niort, ancien hôtel de ville (le Pilori), beffroi avec décor armoirié.

Formé, dans son état actuel, par deux tours reliées par une structure moins élevée, le Pilori est le résultat d’une série d’additions et de transformations successives. Du palais civique médiéval, il ne reste en effet que le beffroi, restauré à la fin du XVIIe siècle (Texier 1990, p. 97). Le clocher a été ajouté à la fin du XIXe siècle à l’occasion d’un plus vaste chantier de restaurations (1882-1887).  Le bâtiment construit sous Jean de Berry fut radicalement transformé entre 1520 et 1535 par l’architecte Mathurin Berthomé, pour l’agrandir et l’adapter au goût de la Renaissance. Dans cette phase, l’espace compris entre les deux tours originelles, au début reliées par une courtine délimitant la cour interne, fut rempli par des bâtiments nouveaux, tandis que la partie basse du beffroi fut englobée dans une tour ronde.

De l’ornementation médiévale ne restent que deux reliefs héraldiques encastrés sur le mur est de l’ancien beffroi. À l’intérieur d’une arcade gothique trilobée, placées sur deux niveaux superposés, se trouvent deux armoiries, appartenant vraisemblablement à un programme unitaire. En haut, nous voyons un écusson timbré d’une couronne, derrière lequel ressort un ange , appuyant ses mains sur les deux fleurons extérieurs de la couronne (armoirie 1). L’armoirie est soutenue par deux cerfs volants, devise du roi de France adoptée, selon la tradition, par Charles VI en 1381 (Hablot 2001, p. 19).

Niort, ancien hôtel de ville (le Pilori), ornementation héraldique aux armes du roi de France et de la ville.

Niort, ancien hôtel de ville (le Pilori), ornementation héraldique aux armes du roi de France et de la ville.

L’écu, qui a été soigneusement gratté – vraisemblablement à la Révolution –, était complété par les trois fleurs de lys de l’armorie du roi de France, dont on devine encore le profil en négatif. En dessous, se trouve un écu aux armes de la ville de Niort (d’azur semé de fleurs de lys d’or à la tour d’argent brochant posée sur une onde de même) soutenu par deux hommes sauvages, placés de part et d’autre (armoirie 2). L’écu, qui constitue le plus ancien exemplaire connu de l’armoirie de Niort (Bouyé 2002, p. 344-355), paraît n’avoir été bûché qu’en partie : seulement la partie supérieure de la tour et quelques fleurs de lys ont en effet été martelés. La disposition hiérarchique des armoiries peut être interprétée comme un signe d’hommage et de soumission à l’autorité royale de la part des magistratures niortaises qui, d’ailleurs, avaient adopté (ou reçu en concession par le souverain) un semé de lys comme fond de l’armoirie citadine afin de marquer leur fidélité à la couronne de France (Bouyé 2002, p. 344-355). Cette adoption remonterait à la reprise de la ville par Du Guesclin en 1373 (ibid.).

Les deux reliefs sont généralement datés de la fin du XIVe siècle (Bouyé 2002, p. 355), à savoir de la conclusion des travaux de construction de l’édifice. Parfois, leur réalisation est fixée à l’année 1393 (voir, par exemple, la page Wikipédia, reprise par nombreux sites et publications), mais on ignore à partir de quel document ou critère cette datation a été établie.

Pourtant, il faudra se demander pourquoi les armes de Jean de Berry n’apparaissent pas sur la tour, sachant qu’il avait l’habitude de « signer » par ses emblèmes les œuvres publiques dont il avait commandité ou promu la construction (voir, par exemple, les remparts ou le Palais de Poitiers). D’autant plus, qu’en 1396 Jean de Berry y aurait fait installer une horloge (Augier 18662, p. 92 ; ou en 1386 selon Don Fonteneau, t. XXXVIII, f. 258v, cité par Courant 2014, p. 119). La composition héraldique pourrait donc être un peu plus tardive et dater du règne de Charles VII, qui adopta lui aussi la devise aux cerfs volants. Le style de la composition semble d’ailleurs mieux s’adapter à cette chronologie, pour la conformation quasiment carrée des écussons, les formes douces et arrondies de l’ange, le profil subtil des cerfs qui rappellent de très près ceux représentés dans la miniature du procès du duc d’Alençon, peinte par Jean Fouquet (1458) (Munich, Staatsbibliothek, Cod. gall. 6, Boccaccio, f. 2v), ou la tapisserie de Charles VII perdue mais documentée par Roger de Gaignières (Guibert 1913, pl. 31). En outre, cette composition ressemble de près celle qui fut réalisée en 1453 par Yvonnet Malion sur la tête du pont sur la Loire à Tours (Bulté 2015, p. 191) : un « grant escusson et trois fleurdelis, une couronne dessus aux armes du roy, au deux costez deux cerfs volans et dessus ledit escusson y a un ange qui tient entre ses bras ladicte couronne et dessoubz ledit escu y a un pot de lis ».

Le Lit de justice de Vendôme, procés du duc d'Alençon. Munich,Staatsbibliothek, Cod. gall. 6, Boccaccio, f. 2v.

Le Lit de justice de Vendôme, procés du duc d’Alençon. Munich,Staatsbibliothek, ms. gall. 369, Boccaccio, f. 2v.

La réalisation du relief armorié pourrait donc entretenir un lien avec l’enquête sur les droits de l’échevinage sur l’hôtel de ville menée par les officiers du roi en 1446-1448. L’affaire se conclut par une sentence du sénéchal du Poitou, qui reconnut la propriété de la place et l’hôtel à la ville contre le payement d’une redevance à chaque changement de seigneurs (De Sainte-Hermine 1836, p. 447) et l’hommage du corps de ville au roi (Favre 1880, p. 98). La disposition hiérarchique des armoiries correspond parfaitement à la volonté d’exprimer la soumission du corps municipal au roi, plaçant les armes de la ville juste en-dessous de celle du souverain. Il ne faudra d’ailleurs pas sous-estimer le fait qu’en 1427  Charles VII avait aussi fait fondre une cloche pour l’hôtel de ville de Niort (Barthelé 1890, p. 283 ; Id. 1903, p. 98).

L’armoirie de la ville de Niort sculptée au-dessus de l’actuel portail d’entrée du Pilori, soutenue par deux lions et timbré d’un casque (armoirie 3) date de l’époque de la reconstruction de l’édifice par Mathurin Berthomé.

Auteur : Matteo Ferrari

Pour citer cet article

Matteo Ferrari, Niort, Hôtel de Ville (le Pilori), http://base-armma.edel.univ-poitiers.fr/monument/hotel-de-ville-le-pilori-niort/, consulté le 19/03/2024.

 

Bibliographie sources

Ch. Augier, Thrésor des titres justificatifs des privilèges et immunitez, droits et revenus de la ville de Nyort, Niort 1866.

Bibliographie études

H. de Sainte-Hermine, « Recherches sur l’ancien hôtel de ville de Niort », dans Revue Anglo-Française, 4, 1836, p. 446-447.

L. Favre, Histoire de la ville de Niort depuis son origine jusqu’en 1789, Niort 1880.

L. Desaivre, « Les armes de Niort », dans Mémoires de la Société de statistique, sciences, lettres et arts des Deux-Sèvres, 3e s., 5, 1888, p. 27-60.

J. Barthelé, « La Cloche de Charles VII à Niort », dans Revue poitevine et Saintongeaise : histoire, archéologie, beaux-arts et littérature, 7, 1890, p. 283.

J. Barthelé, « Le donjon de Niort et son origine anglaise », dans Id., Carnet de voyage d’un antiquaire poitevin, Paris-Montpellier 1896, p. 126-142.

J. Barthelé, Enquêtes campanaires. Notes, études et documents sur les cloches et les fondeurs de cloches du VIIIe au XXe siècle, Montpellier 1903.

J. Guibert, Les Dessins d’archéologie de Roger de Gaignières, III. Tapisseries, Paris 1913.

A. Texier, « Les hôtels de ville de Niort », dans Bulletin de la Société historique et scientifique des Deux-Sèvres, 23, 1990, p. 93-111.

L. Hablot, La devise, mise en signe du prince, mise en scène du pouvoir. Les devises et l’emblématique des princes en France et en Europe à la fin du Moyen Âge, thèse de doctorat, Université de Poitiers, 2001, dir. M. Aurell, M. Pastoureau.

É. Bouyé, « Sceaux et armoiries des villes de communes en Poitou-Charentes », dans Bonnes villes du Poitou et des pays charentais (XIIe-XVIIIe siècles), éd. R. Favreau, R. Rech et Y-J. Riou (Mémoires de la Société des antiquaires de l’Ouest et des Musées de Poitiers, 5e s., 8, 2002), p. 333-357.

D. Courant, « Les chantiers du Moyen Âge », dans Id. (dir.), Histoire de Niort, I. Antiquité, temps modernes, La Crèche 2014, p. 104-126.

C. Bulté, « Emblématique royale dans les hôtels de ville du Val de Loire 1440-1510 », dans Salamagne, Alain (dir.), Hôtels de ville. Architecture publique à la Renaissance, Rennes 2015, p. 189-205.

Photographies du monument

Armoiries répertoriées dans ce monument

Hôtel de Ville (le Pilori), Niort. Armoirie roi Charles VII (armoirie 1)

D'(azur à trois fleurs de lys d’or), timbé d’une couronne et soutenu par deux cerfs volants, à l’ange essorant derrière à l’écu.

  • Attribution : Armoirie bûchée ; Charles VII, roi ; Roi de France ;
  • Position : Extérieur ;
  • Pièce / Partie de l'édifice : Tour ;
  • Emplacement précis : Mur est ;
  • Support armorié : Cadre ;
  • Structure actuelle de conservation : In situ ;
  • Technique : Relief en pierre ;
  • Période : 1425-1450 ;
  • Dans le monument : Niort, Hôtel de Ville (le Pilori)

Hôtel de Ville (le Pilori), Niort. Armoirie ville de Niort (armoirie 2)

D’(azur) semé de fleurs de lys d’(or) à la tour d’(argent) brochant posée sur une onde d'(argent), tenu par deux hommes sauvages.

  • Attribution : Ville de Niort ;
  • Position : Extérieur ;
  • Pièce / Partie de l'édifice : Tour ;
  • Emplacement précis : Mur est ;
  • Support armorié : Cadre ;
  • Structure actuelle de conservation : In situ ;
  • Technique : Relief en pierre ;
  • Période : 1425-1450 ;
  • Dans le monument : Niort, Hôtel de Ville (le Pilori)

Hôtel de Ville (le Pilori), Niort. Armoirie ville de Niort (armoirie 3)

D’(azur) semé de fleurs de lys d’(or) à la tour d’(argent) brochant posée sur une onde d'(argent), timbré d’un casque et tenu par deux lions.

  • Attribution : Ville de Niort ;
  • Position : Extérieur ;
  • Pièce / Partie de l'édifice : Façade ;
  • Emplacement précis : Portail ;
  • Support armorié : Frise ;
  • Structure actuelle de conservation : In situ ;
  • Technique : Relief en pierre ;
  • Période : 1525-1550 ;
  • Dans le monument : Niort, Hôtel de Ville (le Pilori)

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